Ne vous faites plus plumé pas votre banque
Les médias nous enferment trop souvent dans des séquences courtes, nous présentant chaque conflit entre taxis et VTC comme un épisode isolé, chaque manifestation comme un événement spontané. Cette approche fragmentée nous empêche de saisir la véritable nature du problème qui ronge notre secteur des transports depuis plus de deux décennies.
Pour comprendre les enjeux actuels, il faut prendre de la hauteur et analyser le temps long. Car comme le dit l’adage : « avoir la tête dans le guidon, c’est pas bon ». Seule une vision d’ensemble nous permettra de porter une analyse juste sur ce qui s’apparente de plus en plus à un système organisé de déstabilisation de nos métiers traditionnels.
Dès le début des années 2000, les signaux étaient déjà là. La pénurie de taxis à Paris n’était pas un accident, mais le résultat d’une politique délibérée de restriction des licences. Entre 2001 et 2006, cette rareté artificielle a fait exploser le prix des licences de plus de 400 000 euros, transformant un métier d’artisan en rente financière.
Cette période révèle déjà la première faille du système : quand l’État crée artificiellement la rareté, il ouvre la porte aux contournements et aux solutions « disruptives » qui viendront plus tard sous couvert d’innovation.
Dès 2008-2009, avec l’introduction du statut d’autoentrepreneur et le protocole pour 20 000 taxis à Paris, on voit apparaître les premières politiques de formation de masse. Une stratégie qui deviendra systématique : envoyer les gens en formation pour masquer les chiffres du chômage, puis les abandonner à leur sort dans un marché déjà saturé.
2011 marque l’arrivée d’Uber à Paris avec environ 60 VTC. Ce qui est présenté comme une innovation spontanée était en réalité un plan soigneusement orchestré. La loi Novelli de 2009, créant le statut VTC, avait préparé le terrain. Coïncidence ? Peu probable.
Entre 2013 et 2014, le lancement d’UberX puis d’UberPop révèle la véritable stratégie : contourner systématiquement la réglementation française en créant des catégories de chauffeurs en marge de la légalité.
Les Uber Files nous ont révélé l’ampleur des méthodes employées :
Travis Kalanick l’avait dit clairement : « La violence garantit le succès ». Une déclaration qui en dit long sur la philosophie de cette entreprise.
La période 2014-2016 restera comme l’exemple parfait de ce qui peut arriver quand l’intérêt privé capture l’intérêt public. Au moins 17 échanges entre Emmanuel Macron et Uber en 18 mois, organisés grâce à Google et concrétisés lors de dîners chez Xavier Niel.
Les résultats parlent d’eux-mêmes :
Le SMS de MacGann après sa première rencontre avec Macron résume tout : « Meeting méga top… la France nous aime… ». La France ? Non. Une poignée de décideurs corrompus.
Pendant ce temps, France Travail envoyait des milliers de demandeurs d’emploi en formation VTC, leur promettant la lune. Objectif officiel : la réinsertion. Objectif réel : manipuler les statistiques du chômage et fournir de la chair fraîche à Uber.
Cette politique cynique a créé des milliers de « faux chauffeurs » et de « chauffeurs rattachés », dont beaucoup en situation irrégulière, parfois même sous OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français).
Aujourd’hui, nous avons deux catégories de professionnels qui s’affrontent alors qu’ils devraient s’unir :
Les vrais artisans (taxis et vrais VTC) :
Les parasites du système :
Depuis 20 ans, nos gouvernements successifs excellent dans l’art du « pas de vagues ». Envoyer les gens en formation pour masquer le chômage, annoncer des chiffres rassurants à la télévision, fermer les yeux sur les dérives. Un vrai fléau qui nous mène droit à notre perte.
Les chiffres parlent : 9 172 immatriculations d’entreprises VTC en 2019, mais 700 faillites la même année. Le système broie les individus mais enrichit les plateformes.
Uber a accumulé plus de 17 millions d’euros de condamnations en 2023, avec environ 500 chauffeurs demandant leur requalification en CDI. Mais ces sanctions restent dérisoires face aux profits générés par des années de pratiques illégales.
La première mesure urgente est simple : interdire l’exercice des plateformes de transport domiciliées hors de France. Cette mesure éliminera naturellement les parasites « faux chauffeurs » et « chauffeurs rattachés » qui prolifèrent sur ces applications opaques.
Il faut rappeler une évidence que la corruption a fait oublier :
Stop à l’hypocrisie et stop à la corruption.
Qu’ils soient taxis ou vrais chauffeurs VTC, nos artisans du transport méritent mieux que de subir la concurrence déloyale de plateformes qui s’enrichissent sur leur dos tout en détruisant notre modèle social.
Ces professionnels paient leurs charges, leurs impôts, respectent la réglementation. Ils incarnent ce que la France a de meilleur : l’artisanat, le savoir-faire, le respect des règles communes.
Quand on analyse le temps long, le constat est accablant. Ce qui nous est présenté comme une « disruption » innovante est en réalité un système organisé de contournement des règles, nourri par la corruption de nos élites et l’aveuglement complice de nos institutions.
Les taxis et les vrais VTC ne sont pas ennemis. Ils sont les victimes du même système prédateur qui les oppose pour mieux régner. Il est temps qu’ils s’unissent contre leurs véritables adversaires : les plateformes parasites, les faux chauffeurs, et les politiques corrompus qui ont vendu notre souveraineté économique.
L’avenir de nos métiers passe par cette prise de conscience. Car comme l’a prouvé l’histoire, quand l’union se fait contre la corruption, elle finit toujours par triompher.
23/03/2023 Audition de Mark MacGann, Delphine Halgand, Jacques Attali